Fraude à l’Assurance maladie : un manque à gagner estimé à 4,5 milliards d’euros selon la Cour des comptes

La Cour des comptes a publié, le 11 avril, un rapport alarmant sur l’ampleur de la fraude à l’Assurance maladie en France. Alors que l’Assurance maladie annonçait avoir détecté et stoppé 628 millions d’euros de fraudes en 2024, l’institution souligne que ce montant ne représente qu’une fraction des pertes réelles. Selon ses estimations, les fraudes s’élèveraient à 4,5 milliards d’euros, dont seuls 14 % sont effectivement repérés et stoppés.

Les professionnels de santé, principaux responsables

Contrairement aux idées reçues, les assurés ne sont pas les premiers responsables de cette fraude massive. En effet, la répartition des fraudes estimée par la Cour des comptes est la suivante :

  • 68 % des fraudes proviennent des professionnels de santé (médecins, infirmiers, kinésithérapeutes, etc.)
  • 14 % concernent les établissements de santé (cliniques, hôpitaux, etc.)
  • 18 % seulement sont imputables aux assurés eux-mêmes
  • Ces proportions confirment les chiffres déjà avancés par l’Assurance maladie, mais mettent en lumière l’ampleur du phénomène et les marges de progression en matière de contrôle.

Un plan d’action pour renforcer la lutte contre la fraude

Face à ce constat, la Cour des comptes appelle à intensifier la lutte contre la fraude, avec une série de recommandations concrètes pour renforcer l’efficacité des contrôles :

Renforcement des moyens humains et technologiques

  • Mobilisation accrue des effectifs : 1 500 agents déjà mobilisés et 400 nouveaux recrutements engagés en 2024 dans les CPAM.
  • Dotation en outils informatiques performants pour améliorer les contrôles automatisés.

Systématisation des contrôles

  • Suspension automatique des paiements en cas de doute.
  • Développement des vérifications dématérialisées.
  • Recours à l’extrapolation à partir d’échantillons, désormais autorisée aux CPAM, pour détecter plus efficacement les fraudes à grande échelle.

Coordination interinstitutionnelle

  • Coopération renforcée avec la police, la gendarmerie et les services judiciaires.
  • Meilleure collaboration avec les complémentaires santé : l’échange d’informations, prévu dans le PLFSS 2025, pourrait renforcer le maillage antifraude.

Objectif : 1,5 milliard d’euros d’économies

La Cour recommande de viser un objectif de récupération d’au moins un tiers des fraudes estimées, soit 1,5 milliard d’euros. Cela passerait par un meilleur recouvrement des indus, notamment en lien avec les autres branches de la Sécurité sociale et l’administration fiscale.

Des efforts à amplifier pour un enjeu financier majeur

Ce rapport souligne l’écart entre les fraudes réellement détectées et la fraude estimée, et rappelle que des efforts supplémentaires sont indispensables pour renforcer la transparence du système. Avec 4,5 milliards d’euros de pertes potentielles chaque année, la lutte contre la fraude à l’Assurance maladie devient une priorité stratégique pour les pouvoirs publics.

La mise en œuvre des recommandations de la Cour des comptes pourrait non seulement améliorer l’efficacité du dispositif antifraude, mais aussi générer d’importantes économies pour le système de santé, tout en rétablissant la confiance des citoyens dans l’équité des prestations sociales.